Dieu leur dit
Sotiris Dimitriou

Dieu leur dit

Traduit du grec par Marie-Cécile Fauvin

Sotiris Dimitriou ne fait pas dans l’exotisme et connaît bien le pays dont il parle. Il sait décrire avec une simplicité confondante, à travers des personnages du quotidien, comme le petit Valaque qui appelle désespérément son père « dans le désert », la tragédie qu’a connue la région et qui a broyé nombre d’existences. Par bonheur, à plusieurs reprises, des chants s’imposent pour exprimer le désarroi et s’en extraire.

Jean-Paul Champseix En attendant Nadeau

Début des années 2000 dans les montagnes d’Épire, à un pas de la frontière albanaise. Une douzaine de maçons et d’ouvriers – grecs, albanais, grecs d’Albanie – travaillent sur un chantier où ils construisent la maison de « l’émigré », un de leurs compatriotes rentré d’Allemagne après des années d’exil économique.
Bloqués par la pluie, le temps d’une journée, ils se racontent – la vie dans les geôles de Hodja, la répression de la minorité hellénophone d’Albanie sous régime communiste, les périls de la fuite en Grèce, l’intégration douloureuse dans une société où prévaut le rejet de l’autre. Par les mots et le chant, ils exorcisent ensemble leurs tourments et leurs conflits.
« Décaméron » grec qui porte haut la voix des humbles et des déracinéss, Dieu leur dit est une célébration de la puissance libératrice des mots.

1 De l’écrivain grec majeur Sotiris Dimitriou, la voix lapidaire d’une région entaillée, l’Épire, entre Grèce et Albanie […] Pour faire entendre cette région frontalière d’où il vient, pour évoquer dans leurs mots le sort de ses habitants, mais surtout pour jouir de l’immense expressivité de cette langue pourtant laconique, semblable à une pierre colorée tantôt par l’amertume, tantôt par l’humour. Chez cet écrivain, la langue et la situation se bouleversent l’une l’autre.

Feya Dervitsiotis Le Matricule des anges

2 Aucune description de la région dans Dieu leur dit, uniquement des récits d’hommes et de femmes. Au mieux, la terre apparaît comme la gueule ouverte d’un destin néfaste […] Le livre a la fusion pour horizon. La narration disparaît au profit des seuls dialogues et des chants, pour culminer sur une danse collective. Lorsque tous se taisent dans cette extase, l’Épire paraît alors unie de nouveau.

Feya Dervitsiotis Le Matricule des anges
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Sotiris Dimitriou Sotiris Dimitriou

Sotiris Dimitriou

Sotiris Dimitriou est né en Epire en 1955, tout près de la frontière albanaise. Pendant plusieurs années il travaille dans les rues d’Athènes comme chef ...

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Sotiris Dimitriou redessine le patchwork de cette société grecque ségréguée, qui, dans les années 2000, peine toujours à intégrer ceux revenus des geôles, des mines de cuivre, des salines et des camps albanais… quand ils y ont survécu. […] L’auteur redonne dans ces pages ses lettres de noblesse à une langue trempée dans la terre de l’Épire, dialecte rural coloré et imagé, expressif, pétri de dictons frappés au coin du bon sens et de tournures étonnamment complexes, voire archaïques, à la ponctuation minimaliste […] La langue est vecteur collectif d’un vécu unique, d’une histoire tragique, d’une attitude héroïque face à l’adversité, marqueur des particularités d’un territoire en marge d’une Grèce unifiée par la langue officielle.

Anne Thouement Le Présent défini

Ce sont les humbles, les invisibles, les travailleurs manuels, les laissés pour compte, ceux qui n’ont (ordinairement) pas droit au chapitre qui s’expriment […] Ils détachent des pans de leur rude histoire en la frottant à l’autre, la grande, la faucheuse, l’avaleuse des langues et des cultures minoritaires qui n’aura pas réussi à les faire taire.

Jacques Josse Remue.net

On traverse ce texte saisi.e.s par une attention extrême aux paroles des oublié.e.s, paroles qui ne font pas acte de prédication, mais plutôt de confession de la fragilité extrême de l’existence. Fragilité qu’il ne reste plus qu’à chanter et partager, pour garder mémoire.

Andreas Lemaire Librairie Myriagone, Angers

Dans les moments où l’exil se fait, sans réparation ni intégration, très difficile installation. C’est cela que parvient, très humblement, avec une émotion vraie d’être délicatement retenue, à donner à entendre [ce] récit, assez court au demeurant. C’est simple, c’est bien.

Le tour de force de Dimitriou consiste à reconstituer les dialogues de cette petite troupe dans sa langue d’origine, le dialecte épirote, que le contexte rend parfaitement compréhensible, mais dont l’auteur nous montre au passage l’incroyable expressivité.

Florence Noiville Le Monde

Sotiris Dimitriou reconstitue l’oralité (très bien restituée par latraduction) des échanges dans un huis-clos masculin, rudes au début, qui s’humanisent quand chants et danses viennent mettre un peu de chaleur dans les cœurs.

Dieu leur dit est un chant de camarades, un hommage aux conteurs d’histoires, à la culture. 120 pages sorties d’une bouteille où résonnent l’amour d’une patrie et l’amour de la vie.

Fabien Bernier Decitre Grenoble

Insolite et remarquable.